lundi 12 novembre 2012

Les candidats




Après un 11 novembre émouvant, avachis sur mon canapé, à regarder Seven, Brothers et Sabrina l'apprentie sorcière dans lequel joue Ryan Reynolds - comme quoi, même en partant de très loin... - je reviens aux affaires, brièvement ou presque.


Il paraît que mercredi, l'EDF joue contre l'Italie, et personnellement, le football de sélection, je m'en fiche un peu. Le match qui se jouera dans le stade "tout neuf" de Parme sera peut-être bon, plus certainement bidon, à coup sûr mal éclairé. Mais, eh, c'est le charme italien, on emmène la Squadra en province, on ne fait pas de jaloux, et on évite le public bobo des grandes villes. Une piste à suivre. Et puis, ces matchs amicaux où l'on fait six, parfois sept changements dans le même match, non, sans intérêt. Même à FIFA ou PES, je me limite à trois.

Ceci dit, j'aime bien parler de l'Equipe de France. C'est un sujet passionnant, et qui passionne, puisqu'a priori, même ceux qui disent ne pas regarder ces "$µ%$ù*¨!µ**/<8_^\"  (choisissez votre insulte) regardent. En somme, un peu comme Secret Story, et je pourrai pousser l'analogie un peu plus loin en suggérant un début de ressemblance entre Benjamin Castaldi et Didier Deschamps. La maison des secrets serait Clairefontaine. Le diffuseur principal est le même, TF1. L'analogie s'arrête là, je ne sais pas trop qui fait "La Voix" pour l'EDF.


"La Voix", ou "The Voice", pour rester dans le jargon TF1, c'est celui qui impose, tire les oreilles, et sanctionne justement et équitablement les candidats ne se soumettant pas à ses lois. C'est une voix d'homme, rauque, viril et on comprend de suite que ni Chantal Jouanno, ni Ramatoulaye Yade, et encore moins Roselyne Bachelot n'étaient faites pour le job. Le destin a eu la bonne idée de limiter le costume de ministre de David Douillet. Alors, très logiquement, je me dis que "La Voix", c'est la fédération, la "3F" et son président, Noël Le Graët.


Il y a un mois de cela, de jeunes espoirs n'ont pas réussi à conserver leur secret. Pire encore, ils l'ont dévoilé à de jeunes demoiselles -  que je leur souhaite profondément d'avoir "levé", ou d'avoir levé profondément, parce que Le Havre - Paris aller- retour, même en Covoiturage, tu ne fais pas ça pour une coupe de champagne sur fond de Black Eyed Peas*. Bref, la sanction de "La Voix" est tombée. Yann, 22 ans, le plus ancien a payé plus que les autres, parce que c'est le plus ancien, parce qu'il est récidiviste. La peine: exclusion du jeu avec effet immédiat pendant deux ans. Et cela sans le vote du public, son cas était de toute façon déjà enterré. Son passif était beaucoup trop lourd pour être défendu: virée nocturne avec deux jeunes mythomanes cleptomanes (hors période internationale) + refus de serrer la main de son coéquipier et de son sélectionneur suite à son remplacement au cours d'une défaite 2-0 contre l'Espagne + virée nocturne avec quatre potes footballeurs et clubbers (en pleine période internationale) + refus de descendre du bus à Knysna (handicap de principe affecté à chaque nouveau candidat). C'était foutu, et le fait que le football U21 intéresse encore moins que le football féminin n'a même pas été une circonstance atténuante. Je précise avoir longtemps hésité entre "intéresse beaucoup moins" et "moins utile", mais, eh, je n'ai pas les moyens de me battre contre des seins nus venus d'Ukraine.




Cependant, un truc me chiffonne. "La Voix" est censée être juste, équitable, mesurée. Je veux dire, Anelka, a connu la même sanction, alors que lui, son passif, c'était quand même autre chose: exigence envers sélectionneur, ouverture de guillemets: "Qu'il s'agenouille devant moi, s'excuse d'abord, et après je réfléchirai" + dézonage intempestif + réouverture de guillemets: "Va te faire enculer sale fils de pute" à l'encontre du sélectionneur, ce qui en fait n'est pas la citation exacte, mais faisons comme-ci + refus de descendre du bus + Nicolas Anelka lui-même = 18 matchs. Autrement dit deux ans. Et si on fouille. Evra : Refus de descendre du bus (majoration capitanat) + echec dans la recherche de la taupe + larmes de crocodiles avant le match contre le Mexique = 5 matchs. Bon, si je compare ça à Nasri: refus de descendre du bus + refus de reconnaitre l'autorité naturelle de Gallas + vol de la place de Thierry Henry dans le bus + insulte envers quelques journalistes = 3 matchs. Comme Ribéry en 2010? Et Cantona, qui avait traité son sélectionneur de "sac à merde", 3 mois de sanction, seulement?! Non, "La Voix" ne peut être la fédération.


Le second candidat naturel dans ce rôle, c'est la presse. J'aurais pu dire l'Equipe, mais les challengers sont tellement importants, que non, je dis la presse. On considèrera l'Equipe comme Don Corleone. Elle est efficace, elle voit juste, est impartial distribue les bons et les mauvais points, débusque les tricheurs, fait défait les carrières. La presse.


Quand elle se fait insulter, elle obtient qu'on suspende le candidat 3 matchs. L'insulter, c'est insulter un membre important de la production, une faute grave. L'insulter, c'est ne pas faire honneur au drapeau, à la patrie, à la nation. Elle donne le "la", lance des informations, attends que ça retombe, ramasse, redistribue. Elle crie un jour que Franck "Bilal" a tapé le petit Yohann, candidat fragile aimé du public, puis, deux ans plus tard, se rétracte discrètement d'un laconique "si les rumeurs n'étaient pas avérées" noyé au milieu d'un article. Et peu importe que le petit Yoyo, chez lui à Lyon, rencontre les mêmes difficultés à s’intégrer à la vie de groupe, c’est forcément la faute des racailles. Elle fait la pluie et le beau temps, s'acharne sur certains candidats, en épargne d'autres. Bah ouais, elle ne peut pas massacrer tout le monde, sinon, son business s'effondre, sans les candidats, elle n'est rien. Rien du tout. Il n'est pas rare que l'Equipe consacre les 3/4 de son édition du jour au football. RMC en parle quotidiennement de 16h à 00h. C'est le business.


Alors, elle a son favori. Karim, jeune lyonnais, le meilleur des candidats, le candidat idéal. Il a tout pour gagner, enfin, il a tout pour faire gagner le business. Il est capable de choses que seul lui peut faire. Aussi, quand il dit qu'il aurait préféré participer à Koh-Lanta, mais que Secret Story, c'est mieux dans son business, on le défend. Quand il ne joue pas le jeu, on le taquine un peu sur les côtes, mais on le protège. Quand il rigole pendant le jingle, on n'effleure pas le sujet, cela pourrait ruiner la stratégie entière. D'ailleurs, elle réintègre Franck le caïd, quand elle sent que les nouveaux candidats ne sont pas productifs, que le business ne tourne plus trop. Si le bon peuple se détourne du business, ce n’est pas bon, alors elle se dit: "on y est p'tet allé un peu fort" et réhabilité Franck. Eric Abidal, pareil, le business avant tout. Souvenez-vous, quand Raymond, le présentateur en 2004 parle de « fonds de tiroirs », et qu’il rappelle Nicolas, la presse acquiesce. Timidement, mais elle acquiesce. Après tout, Raymond, lui, n’avait pas à se mettre à genou pour le faire venir. Oh, elle a bien quelques dissident dans son système. L'ennui est qu'il sont dans le système, et, quand tu es dans le système, tu n'es plus vraiment un dissident. Enfin..., ouais.Voilà. En fait, la presse ne peut pas être "La Voix".


Reste le peuple ;  beau, intelligent, patriotique, qui comme en Angleterre accueille par des cortèges remplis de fierté tous ses soldats tombésau combat... Ce peuple fort, mu par un même désir souverain, qui aime ses champions des éditions 98 et 2000, même s'ils savent que le gagnant le plus illustre, le chauve, et le nouveau présentateur ont été dopés. Ce peuple qui pardonne ses champions, cloue au pilori les autres, s'émeut de la main trop grande d'un candidat qui lui voulait du bien, et béatifie celui qui agresse de sa tête. Ce peuple inconstant, frivole, léger, qui parle de respect quand ses éléments les plus respectés moquent en des termes peu courtois son président élu. Ce peuple qui dit à Teddy Riner: "tu as gagné, on s'en fiche que tu chantes". Oui, ce peuple patriotique, qui aime conter aux plus jeunes l'histoire du siècle précédent, pour mieux les plaindre du futur gris qui les attend. Oh, à l'époque, disent les anciens, la bonne humeur du candidat Fabien,  toujoursdétendu et souriant dans les moments dramatiques était rafraîchissante. A l'époque. Imaginons un instant, que Samir, Yann, Jeremy est les autres, battent l'Espagne, et par je ne sais quel miracle, remporte le graal, qu'aurait dit le peuple? Après tout, qu'a-t-il dit après le coup de crampons de Zinedine en 1998? Pas grand-chose, il a courbé l'échine, et a adoré son idole. 


En fait, "La Voix" n'existe pas, personne ne régule le jeu, personne n'est honnête dans le jeu, mais tout le monde exige que les candidats le soient, même si au fond, tout le monde s'en fiche. Les candidats qui ont affronté en duel l'Angleterre et l'Ukraine, ils aimaient la patrie, la nation. Seulement, trois jours plus tard, face à la Suède, ils ne l'aimaient plus. Et face à l'Espagne, ils l'ont haï. Et on s'est souvenu que certains d'entre eux, ne chantent pas cette chanson qu'on n'apprend pas à l'école.


Il y a un autre jeu, qui reprend les mêmes concepts, et à terme, risque de copier le modèle Secret Story. On le dit différent pour l'instant, porteur de valeurs plus nobles (alors que les producteurs sontconscients des inévitables similitudes) parce que Yannick, là où Karim et Samir rigole - on ne sait pas trop pourquoi - pleure. La mauvaise langue que  je suis dira que Samir connaissait malgré tout les paroles. Patrice aussi a pleuré, avant de refuser de descendre du bus. On lui a reproché d'avoir de bons talents de comédiens.




A l'Eglise, il y a ceux qui chantent à tue-tête, ceux qui chantent dans leur tête. Ceux qui prennent l'hostie dans la main, ceux qui veulent qu'on leur dépose sur la langue. Ceux qui ferment les yeux, ceux qui regardent l'autel. A l'église, pendant la liturgie, il m'est arrivé de rire, d'être distrait, d'essayer d'être discret, d'éviter la réprimande maternelle. Je ne crois pas que mon Dieu, pourtant sévère, me promet l'Enfer. 



Junichi